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Lutte contre la pénurie de logements: l’appel au compromis

Alors que la demande devient toujours plus forte, construire s’apparente de plus en plus à un chemin de croix. Que faire?

La pénurie de logements est sur toutes les lèvres, mais les efforts réels pour la résorber restent trop souvent dans les intentions. En tant que professionnel de la gestion immobilière, je mesure chaque jour à quel point il devient difficile de concrétiser un projet de densification. À force d’accumuler les exigences, on finit par rendre les projets irréalisables.

Ce sujet mobilise beaucoup d’acteurs. Politiques, promoteurs, associations de défense du patrimoine, de l’environnement, des locataires: tous s’expriment, souvent avec conviction et sincérité. Chacun défend une cause – et toutes sont légitimes. Mais ces exigences, accumulées sans coordination ni hiérarchisation, ont une conséquence concrète: l’abandon de milliers de logements.

Prenons l’exemple d’un projet de densification dans une commune vaudoise. Il devra intégrer des matériaux naturels pour respecter l’esthétique locale, reproduire des détails architecturaux historiques, dissimuler les isolations pour ne pas heurter les regards. Le patrimoine est une priorité.

Puis viendront les obligations d’accessibilité (rampes, largeurs de passage, …), de sécurité (désamiantage, garde-corps, normes incendie), d’environnement (toiture végétalisée, gestion des eaux, …). La sécurité et l’accessibilité sont une priorité.

Il faudra aussi intégrer des dispositifs énergétiques performants: isolation renforcée, panneaux solaires, récupération de chaleur, etc. À cela s’ajoute le projet de loi cantonale sur l’énergie qui prévoit d’imposer des panneaux photovoltaïques sur toutes les surfaces disponibles, le pré-équipement de chaque place de stationnement pour les véhicules électriques, ou encore l’obligation de remplacer les chaufferies au fossile. La lutte contre le réchauffement climatique est une priorité.

Les investisseurs doivent en plus assumer les retards liés aux oppositions, les surcoûts techniques et les conditions de financement devenues plus strictes, sans oublier le contrôle des loyers plafonnés par l’autorité. Intégrer une marge économique est indispensable, elle est vite perçue comme abusive, alors qu’elle est souvent le minimum nécessaire à la viabilité du projet.

Faire des choix

La production de logements repose désormais sur une équation presque insoluble. Et pourtant, ce sont bien les investisseurs – et non les lois – qui construisent les logements.

Mon propos ne vise pas à opposer les acteurs. Toutes les préoccupations évoquées sont légitimes. Mais à force d’exiger le respect intégral de chaque norme, chaque idéal, chaque revendication, on oublie que la réalité impose des choix.

Il est temps de sortir de la logique de confrontation pour entrer dans celle de la coordination. Un projet immobilier ne peut satisfaire à toutes les attentes. Il doit être le fruit d’un équilibre. Et donc, d’un compromis.

Dans ce contexte, il appartient aussi aux autorités d’endosser un rôle d’arbitre. Loin de simplement additionner les injonctions, elles doivent favoriser des solutions équilibrées, orientées vers la faisabilité. La volonté politique ne peut se limiter à poser des exigences: elle doit aussi permettre de les concilier.

Car l’alternative au compromis, c’est l’abandon. Et chaque abandon, c’est un logement qui ne verra pas le jour, une famille qui restera sans solution. La création de logements est la priorité.

Fabien Anex, Président de l’USPI Vaud.

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